Six siècles de fortifications à Mons


Compte rendu de la conférence donnée le 15 mai 2024 par Bruno Van Mol


 La ville de Mons est bâtie sur une colline au milieu d’une zone marécageuse inondable par les eaux des rivières La Haine (au nord et à l’ouest) et La Trouille (à l’est et au sud). Elle s’est trouvée fortifiée à plusieurs époques par les occupants successifs.

  • Depuis l’enceinte comtale de 1 000 m enserrant le haut de la colline au 12e siècle ;
  • en passant par les remparts médiévaux périphériques communaux construits de 1300 à 1820, équipés des premiers bastions à orillons, une nouveauté italienne ;
  • puis les fortifications bastionnées ajoutées par les Espagnols aux 16e et 17e siècles ;
  • amplifiées par les fortifications françaises de 1691 à 1748 réalisées par Vauban, comprenant toute une série de nouveautés : ouvrages à cornes, redoutes à machicoulis, redoutes dans les marais, casernes modernes de cavalerie et d’infanterie, et même un projet de citadelle dans le bas de la ville (pour laquelle il eut fallu araser la bute du château ! ), projet heureusement abandonné ;
  • ensuite autrichiennes de 1751 à 1781, plus sommaires, comprenant des bastions élevés en terre et un fort détaché à cinq bastions sur la route vers Tournai ;
  • et enfin hollandaises, lorsque après Waterloo, les Alliés anglo-hollandais ont ceinturé une dernière fois la ville par une formidable fortification « à la moderne » , suivant un tracé comprenant quatorze bastions polygonaux régulièrement espacés, deux fois autant de réduits de places d’armes, des tenailles et des demi-lunes devant chacune des six portes et poternes, un ouvrage à cornes au bout du récent canal de Mons à Condé, des lunettes avancées triangulaires échelonnées devant les portes de Bertaimont et de Nimy aux traversées pénibles, qui, en 1837, furent remarquées par Victor Hugo sortant de la ville en diligence :
    « Mons est une citadelle ; et une citadelle plus forte qu’aucune des nôtres. Il y a huit ou dix enceintes avec autant de fossés autour de Mons. En sortant de la ville on est rejeté, pendant plus d’un quart d’heure, de passerelles en pont-levis, à travers les demi-lunes, les bastions et les contrescarpes. Ce sont les Anglais qui ont mis cette chemise à la ville pour le jour où nous aurions le caprice de nous en vêtir.»

Tout un réseau de galeries souterraines d’écoute et de contre-mines établies par les Hollandais devant la porte de Bertaimont (sortie vers Maubeuge) subsistent encore sur les flancs du mont Héribus. En 1861, la démolition des fortifications qui ceinturent des villes belges est décidée : c’est le cas de Mons au même titre que Anvers, Ath, Bruxelles, Charleroi, Liège, Namur, Tournai, Ypres, … À Mons, les démolitions vont bon train et en 1865, un plan d’aménagement de l’espace occupé par les fortifications cédé à la ville est dressé et affecte l’espace à la bâtisse desservie par des boulevards périphériques qui sont rapidement construits et lotis.

De tous les ouvrages militaires, ne subsistent que le château comtal sur le haut de la bute, la tour Valenciennoise du 13e siècle le long de la rue des Arbalestriers, et la boulangerie militaire (sous les jardins suspendus) dans la rue des Arquebusiers, et les casemates hollandaises de la rue des Canonniers. À l’extérieur des boulevards, des tracés curieux de voiries (rue du Fish-Club, Chemin du Versant, …) en gardent le souvenir.

Par contre, d’importants vestiges de ces fortifications successives truffent le sous-sol de la périphérie de la ville. Ils se rencontrent fréquemment aux alentours et sous les boulevards actuels. Certaines substructions imposantes furent mises au jour dans les années 1980, lors de la construction de tunnels routiers sous les principaux carrefours de Mons. Leur étude a permis de localiser les remparts et leurs vestiges sur la totalité de l’espace occupé par les boulevards de la ville.

Des témoins des bombardements auxquels la ville a été soumise à plusieurs reprises (en 1691, par les Français, en 1709, par les Anglais après Malplaquet, et à nouveau en 1746 par les Français – qui ont ensuite démoli les remparts) subsistent, notamment des boulets français frappés de la fleur de Lys qui sont incrustés dans un mur du couvent des Sœurs Noires (actuellement FUCAM). Quelques pierres caractéristiques de ces remparts (la base d’une pile d’un pont dû à Vauban et la pointe de la demi-lune devant la porte d’Havré due à Van de Polder) ont été récupérées et présentées dans la cour des Anciens Abattoirs de Mons où elles sont visibles en tout temps.

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